27 Mar 2008, 23:22
Tata continue de faire parler de lui. Après le lancement en grandes pompes de la Nano, la voiture la moins chère du monde, le géant indien a annoncé mercredi avoir racheté à Ford les marques Jaguar et Land Rover, pour un montant de 1,4 milliards d'euros. Avec cette opération, le conglomérat indien va se développer en Europe et d'entrer dans un secteur où il était absent : la voiture de luxe.
L'Inde poursuit son expansion économique. Après Arcelor, racheté par le milliardaire Lakshmi Mittal, deux nouvelles entreprises européennes sont tombées dans des mains indiennes. Mercredi, Ford annonçait en effet officiellement avoir cédé, pour environ 1,4 milliard d'euros, les constructeurs automobiles britanniques Jaguar et Land Rover au conglomérat Tata. Une vente surprise qui s'explique en partie par la situation financière précaire de Ford -une perte de 2,7 milliards de dollars en 2007 et de 12,6 en 2006- ainsi que par sa volonté de recentrer son activité sur l'Amérique du nord.
"Nous avons un énorme respect pour les deux marques et nous nous emploierons à préserver leur héritage et leur compétitivité et à les développer, gardant intact leur identité." Ratan Tata, président de Tata Motors, l'a joué modeste au moment de commenter sa double acquisition. Le conglomérat indien - 98 sociétés sont étiquetées Tata, dans des secteurs aussi divers que le sel, la sidérurgie, la chimie ou l'énergie - va pourtant changer son image de marque à l'étranger grâce à cette opération.
Premier constructeur automobile en Inde, Tata restait méconnu sorti de ses frontières. Le lacement de la Nano, voiture la moins chère du monde avec ses 2500 euros, était un premier signal fort. Le rachat de ces deux marques haut de gamme en est un autre.
TATA S'EST ENGAGE A NE PAS LICENCIER
Ford, lui, ne semble pas regretter outre mesure ses deux filiales. Le géant américain a en effet réussi à imposer ses conditions avant de contracter la vente, le transfert de propriété ne devenant officiel qu'à la fin du trimestre. Le groupe indien a en effet dû se plier aux moindres exigences des Américains pour emporter la mise. Il s'est ainsi engagé à maintenir la chaîne de production et à ne pas la délocaliser en Inde, ce que craignaient fortement les quelque 56 000 personnes qui travaillent directement ou indirectement pour Jaguar et Land Rover.
La marque Jaguar ne pourra pas non plus être vendue à un tiers. Tata, enfin, s'est engagé à maintenir l'emploi non loin du niveau actuel. Satisfait de voir toutes ces conditions réunies, Ford a accepté d'apporter une contribution de 600 millions de dollars aux caisses de retraites déficitaires des deux marques cédées.
Une vente qui s'est donc fait dans une concorde apparente. Unite, le plus grand syndicat britannique avec deux millions d'adhérents, a lui aussi donné sa bénédiction à l'opération, avec un léger bémol toutefois. "Nous aurions préféré que Ford conserve ces entreprises dans son giron, d'autant plus que Land Rover est très rentable, a déclaré mercredi Tony Woodley, secrétaire général adjoint du syndicat Unite. Mais avec les engagements qu'a donnés Tata pour le futur de Jaguar et Land Rover, et notamment de continuer à se fournir en moteurs fabriqués (dans les usines Ford, Ndlr) à Bridgend et Dagenham, nous sommes heureux qu'ils se soient impliqués". Déjà sous les feux de la rampe avec sa Nano, Tata frappe un nouveau grand coup.