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[philmour]

Alexandra Legendre, rédactrice en chef adjointe de «L’Automobile Magazine», explique la concurrence des constructeurs automobiles asiatiques en Occident.

20m :La situation est-elle vraiment mauvaise en France pour les constructeurs français ?

AL : J’ai du mal à prendre part au catastrophisme ambiant. Certes, les parts baissent. Aujourd’hui, les constructeurs français détiennent environ 54% du marché automobile. Ce n’est pas si mal lorsque l’on pense que seuls 35 des 380 modèles de voitures présents sur le marché hexagonal sont français. La gamme est vieillissante et il est donc normal de perdre des parts de marché dans un univers beaucoup plus concurrentiel. C’est le cas d’ailleurs dans toute l’Europe. De plus, les Français sont très présents à l’étranger. En 2006, Peugeot a augmenté ses ventes en Chine de 40% et Citroën de 80%. Dans deux ans, Citroën vendra plus de voitures dans l’Empire du Milieu qu’en France. Il n’est plus possible de se contenter de regarder les ventes sur le seul territoire hexagonal.
Aujourd’hui, comme il n’y a plus de mauvaise voiture française, la fidélité du consommateur dépend davantage de la serviabilité et du sérieux de son concessionnaire. Un facteur que les marques ne maîtrisent pas.

20m : Alors que le salon de l’automobile de Detroit s’ouvre dimanche aux Etats-Unis, les constructeurs américains font grise mine. Les trois principaux, General Motors (GM), Ford et Chrysler voient leurs ventes baisser alors que les asiatiques prennent des parts de marché. Comment expliquer un tel phénomène ?

AL : Il n’est pas récent puisque ça fait maintenant 30 ans que ça dure et que les Japonais sont très bien implantés aux Etats-Unis. Toyota a même cinq usines sur le territoire américain. Ils ont compris les besoins des Américains dans un marché qui manque cruellement de renouvellement des modèles. Il faut dire que Ford et General Motors souffrent d’un endettement colossal et sont en quasi-faillite en raison des retraites à payer aux anciens salariés…
Bien que la grosse Ford F-150 reste la voiture la plus achetée, les Américains, et en particulier les urbains, se tournent vers des voitures plus raisonnables en taille, des berlines qui consomment 10 litres au cent kilomètres et non plus 20.

20m : Les Japonais sont également très présents sur le marché des voitures hybrides...

AL : Les hybrides représentent, aux Etats-Unis comme ailleurs, des mini-marchés. Il y a bien un effet de mode, notamment depuis que Leonardo DiCaprio a acheté une Toyota Prius mais seules quelques centaines de milliers d’hybrides sont vendus dans le monde chaque année.
Quant au développement de moteurs écologiques – comme le moteur Blue Tech de Mercedes, ce n’est pas pour tout de suite. Les Américains continuent de rouler à l’essence malgré de vaines tentatives de relancer le marché diesel. Le gros pick-up n’est pas mort : l’Amérique profonde reste attachée aux Van et autres 4X4 très gourmands en essence. Si l’on veut que les consommateurs se tournent vers des produits écologiques, il faut que l’écologie coûte moins chère.

20m :Les Japonais sont très présents. Qu’en est-il des autres constructeurs asiatiques ?

AL :Les Coréens sont en phase d’installation sur le marché américain comme l’étaient les Japonais il y a vingt ans. Mais les Chinois, eux, restent absents des marchés internationaux car ils sont trop absorbés par leur croissance interne. Il y a huit ans, les Chinois achetaient 800.000 voitures particulières par an. Aujourd’hui, ils en achètent 4,1 millions. Les constructeurs chinois seront davantage présents ensuite sur les marchés africains et sud-américains mais pas sur les marchés nord-américain et européen en raison de la faible qualité de leur production.

Propos recueillis par Alexandre Sulzer